Mai

Château d’Au, le 2 mai 1996.
Ma tendre Sandre,
Après un déjeuner du 1er mai qui s’est prolongé une dizaine d’heures, je reviens avec des frissons d’amour vers toi, ma douce.
[Pourquoi ce nom de poisson, par analogie à Sandre ? Ou pour me tendre une « perche » : c’est fin comme ma chair !]
J’officialise l’explication que je t’ai donnée pour le petit nom Sandre. Au-delà de la simple réduction de ton joli prénom, je faisais allusion par homophonie au chat gris que tu as recueilli partiellement, le capricieux Cendre. Mais je ne renie en rien ton propre apport à l’exégèse : la finesse de ta chair et l’excellence des antres valent bien la succulence du poisson acanthoptérygien. Ceci simplement écrit...
[Tu ne pourrais pas m’envoyer une jolie copie de toi ?]
J’essaie, dès que possible, de te dénicher une belle vue panoramique de ma géographie... En espérant que tu n’aies pas le vertige ma Sandre... Faut bien que j’me fasse un peu de bien comme je n’ai pas reçu de parchemin sandré aujourd’hui.
[Connaître quelqu’un à un point x est à mon avis un peu réducteur. Je préfère une vision d’ensemble, version grand angle.]
Pour ne pas cultiver l’opacité de mon passé, je te prêterai la tranche de vie consignée dans mon Journal tenu depuis août 1991. Tu m’auras à l’état brut. Tu découvriras le gâchis exemplaire sur le plan sentimental et professionnel. Que cela ne t’éloigne pas de moi, car je ne suis plus le même qu’en 1993 et 1994...
[Nos « brasiers charnels » ont ils besoin d’être entretenus véritablement ?]
Cet entretien ne doit pas s’envisager comme un devoir mais comme un plaisir. Nous tendons à être l’un à l’autre, ma gourmandise sensuelle et sexuelle t’est donc toute entière dédiée...
Je te crois foncièrement saine et équilibrée lorsque tu es en confiance. Je ne me fais aucun souci pour nous sur le plan de la communion des corps et des esprits. « Aristocrate dans la vie, salope dans mon lit » comme dirait Heïm...
[Pourquoi dit-on Byzance pour l’abondance de quelque chose ?]
Allusion directe à sa puissance commerçante après son indépendance (358 av. J.-C. ). Ce n’est qu’en 330 ap. J.-C. qu’elle est intégrée à l’Empire romain et choisie comme capitale par l’empereur Constantin, d’où Constantinople.
Tu vois que je sais rester sage.
A très vite... toutes mes caresses sur ton corps, tous mes baisers...
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Vendredi 3 mai
0h53. Je quitte à l’instant ma Sandre. Notre rapport est un enchantement : douceur, complicité... Elle est très sévère sur elle et son apparence physique. Même...
Pas très inspiré ce soir...
Dimanche 5 mai
Je reprends mon éloge à Sandre. J’ai eu droit à plus de cinquante lettres, depuis la mi-janvier, et ma rencontre avec Sandre m’a confirmé dans mon penchant pour elle. Un visage fin et sculptural, un peu sévère, un corps d’adolescente, doux et enivrant, et une âme de princesse. Je retourne la voir jeudi prochain. J’ai reçu, sur ma suggestion, deux cassettes de sa voix, ce qui me permet de m’endormir avec elle... J’espère savoir correctement l’aimer, et ne pas céder à mes atermoiements habituels.
Le Salon de Limoges s’est excellemment déroulé. Madeleine toujours aussi affectueuse et attentive ; Julie S., l’interprète de ses poésies, aussi complice.
Plusieurs contacts intéressants : Gonzague Saint-Bris à l’occasion d’un déjeuner au Bœuf rouge, le journaliste et grand reporter Jacques Derogy présenté par Madeleine, de grands sourires d’Eve Ruggieri et beaucoup d’autres moins connus.
Dans le train Limoges-Paris, Louise Longo, femme au destin tragique, s’assoit en face de moi. Bien qu’ayant perdu en 1994 son ex-mari et sa fille de huit ans en pleine mer, elle garde une foi admirable en la vie. Nous échangeons nos coordonnées après deux heures de conversation tous azimuts. Je la sens ému aux larmes lorsque je lui parle de l’intensité de la correspondance amoureuse que j’entretiens avec Sandre. Ses propres souvenirs catalysent ses émotions. Après Jacqueline Kelen, rencontré dans les mêmes conditions, le train Limoges-Paris me porte chance.
L’actualité n’emballe pas vraiment. Rien qui ne mérite une verve au vitriol.
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Le 6 mai 1996.
La suite de mes déambulations ma tendre Sandre. [Journal joint]
Oublié de te dire que tu pouvais écrire sur ces pages toutes les remarques, annotations, questions et réflexions (ou émotions) qui passent par ton esprit fertile.
A très vite ma Sandre d’amour.
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De la B.N., le 13/05/96.
Ma Sandre,
Déjà l’absence de ta silhouette m’est pesante.
Sitôt débarqué à la gare de Lyon, j’ai filé à la Nationale, et me voilà cherchant des localités du Rhône qui pourraient avoir besoin de l’exhumation d’un livre sur leur histoire.
Nous allons chacun reprendre nos rythmes après ces trois jours (et quatre nuits) d’une merveilleuse douceur.
Merci à toi de ce que tu es. De chaudes pensées et de doux baisers.
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Paris, le 14 mai 1996.
[Carte postale : photo d’Auguste Renoir dans sa propriété de Cagnes-sur-Mer, 1915.]
Amour de Sandre,
Renoir comme cordon ombilical de nos lumineuses figures sensuelles. Il aurait fallu saisir ces saillances fusionnelles pour tracer comme un horizon charnel.
La beauté d’être et la fraîcheur d’aimer, voilà ce qui m’incline vers toi.
Older de George Michael berce ma plume.
Ton prétendant.
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Le 14 mai 1996.
[Carte postale : photo de Louis-Ferdinand Céline à Meudon, 1955.]
Pour toi ma tendre Sandre,
Ce cher docteur Destouches et un charmant minou en pleine pose.
Avant de reprendre mon train corail à destination de Laon, les échos de ton touchant message faisant encore frémir mes trois osselets, je t’adresse mes plus déterminés sentiments d’amour, et les baisers des plus frôlés aux plus voraces.
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Quelque part dans un train, le 14 mai 1996.
Ma Sandre,
Plus au calme, je vais pouvoir remplir ces petits carreaux qui te sont dédiés comme autant de pores ouverts pour mieux te respirer.
Avant tout, l’actualité musicale : l’album dernière cuvée de George Michael, Older, est f.a.b.u.l.e.u.x. : la créativité qui s’en dégage, la profonde harmonie des mélodies, le timbre presque mystique de son chant, tout cela inspire au plus haut point. Si un soupçon de désir t’effleure, je peux te faire parvenir un enregistrement sur cassette. Nous aurons ainsi les mêmes musiques pour nous bercer.
Lu ton courrier qui devait m’arriver avant mon départ. J’espère qu’après cet enchanteur week-end prolongé tes angoisses se seront dissipées.
Comme toujours, ta curiosité tous azimuts me contraint (hé hé) à camper le rôle de l’informateur. Ma plume se fait un peu appuyer sur la pointe pour laisser s’écouler la noire, mais je me lance.
Une myriade de choses nous restera à faire lorsque je serai de retour dans ton Lugdunum que je désirerais plus ensoleillé, même si nous brûlons de l’intérieur : un ciel bleu n’a jamais fait ombrage aux truculences amoureuses.
Déambuler dans le musée Saint-Pierre à la recherche de quelques-uns de tes souvenirs, grignoter ensemble bien nichés au coin de l’Orangeraie, s’oxygéner de serre en serre... petit panorama de ce qui nous réunira bientôt.
[Aimerais-tu me voir avec mes lentilles, ou cela n’a-t-il pas une grande importance... à tes yeux ?]
Bien sûr que je préférerais tes yeux sans obstacle, à nu. Je n’ai pas encore eu ce privilège, hormis lors de nos communions corporelles. Réserve leur port, si tu ne les supportes pas pendant de longues durées, lorsque nous sortons, ton charme en sera grandit. Mais tu es aussi adorable avec tes discrètes rondes...
[Tu n’as aucune nouvelle de Alice ? Quel âge a-t-elle aujourd’hui ?]
Je n’ai pas de nouvelles précises de dame Leborgne depuis fin 1994, et je ne m’en plains nullement. Je sais seulement qu’elle a repris contact depuis quelques mois avec sa mère Line., ce qui n’est pas le signe d’un quelconque changement d’attitude. Qu’elle aille au diable, je m’en bas les gonades. J’ai fait mon autodafé de son souvenir. Elle a dû avoir 31 ans en janvier 1996.
[J’aimerais bien voir à quoi ressemble ta chambre ; tu connais mon environnement familier, pas moi.]
Je ne sais si le pied-à-terre parisien vaut le détour pour y trouver quelques traces de ma personnalité. Ce grand placard fonctionnel n’est pas de mon cru pour la décoration et l’ameublement, et je n’y ai laissé que le strict minimum. La plupart de mes affaires sont encore dans des cartons au château. Dans l’attente d’être plus solidement installé.
Hélène T., ma logeuse, ne voit aucun inconvénient à ce que je t’accueille, même si elle est présente.
Voudrais-tu m’expliciter sur quels points les garçons ne te comprenaient pas ? Et pourquoi ai-je moi ces clefs ? La progression de notre relation est-elle à ton goût ? Où trop précipitée ?
[La cassette de la douche t’a amusé et « puis autre chose », c’est quoi donc ? Cela t’a donné envie de moi ? Juste un peu d’eau suffit ?]
La scène (auditive) de la douche m’a en effet permis de passer un très bon moment compensatoire avec un ersatz de ta présence.
[On aura besoin d’une voiture là-bas, pour se balader ?]
Pour notre voyage à l’île de Ré, je crois qu’il serait préférable de disposer d’un véhicule pour nos commodités de déplacement. [...]
Voilà le tour des questions de ta dernière lettre reçue à Paris. Les moments que nous avons partagés sont intensément survivants dans mes fibres. Je nous présage beaucoup de douceurs à venir et l’inexorable rapprochement.
Cette correspondance tempère notre séparation spatiale et enrichit notre découverte réciproque aux bornes inaccessibles.
Je te souffle mes plus fruités baisers voyageurs. Tendrement tiens.
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Château d’Au. le 17 mai 1996.
Ma Sandre,
Très ému par ta carte au coquelicot. Je t’aime mon bébé, et rien de négatif ne doit germer en toi. Je suis aussi là pour t’aider dans les moments difficiles, même si ma réaction à chaud dramatise trop.
Point d’ombre pour moi, juste l’envie que ton combat réussisse.
Je reviens à tes courriers antérieurs toujours, à mon grand plaisir, truffés d’interrogations.
[Je ne t’ai pas parlé des détails concernant ma marâtre de mère : une autre fois.]
Je souhaiterais bien, en effet, connaître ces problèmes : que tu me les révèles au creux de l’oreille ou sur une page.
[J’espère, à l’avenir, devenir aussi coquine que tu le voudrais.]
Je ne doute en rien de tes capacités à la coquinerie. C’est moi peut-être qui veut trop tout de suite... J’essaierais de prendre ton rythme.
[Mad m’a demandé si cela ne t’avait pas trop perturbé de la voir ? Je ne le pense pas.]
J’ai bien évidemment été très heureux de rencontrer ta mad. Je comprends ton attachement profond à elle et la fidélité qui vous lie.
[Trouves-tu chevaleresque de me laisser rentrer seule chez moi cet été ?]
Ce n’est en effet pas très élégant de t’abandonner pour le retour de l’île à Lyon... Nous en reparlerons. Peut-être serait-il plus pratique que je reprenne un train depuis chez toi...
[Allons-nous nous voir que tous les mois pendant ce couple d’années ? Structure rigide dans ton esprit ? Comment vais-je juguler mes ardeurs à ton égard, tendre démon ?]
La fréquence de nos entrevues est pour moi essentielle à équilibrer. Cela, malheureusement, ne dépend pas simplement de nos désirs, sinon je serai toujours fourré (en tout bien, tout honneur) chez toi.
Je t’envoie, comme tu as pu t’en apercevoir, un assortiment de photos... les grandes ont été prises par Madeleine Chapsal lors de notre visite du château du Reynou (cf. mon Journal).
[Par quoi vas-tu remplacer tes séances de spéléo. nocturnes ? (Rires)]
La spéléo. corporelle me manque, en effet, mais je repense souvent aux mouvements délicieux de ton majeur sur... Une danse enivrante.
[Penses-tu que je puisse porter ma capeline noire pour le mariage ?]
Que tu vas être jolie avec... Si en plus tu avais une petite cape pour femme (dans les beiges)... ce serait un délire.
[Tu as quoi comme arbres fruitiers dans ton verger ? As-tu un potager ?]
Beaucoup d’arbres fruitiers que nous avons plantés : chaque arbre donnera une espèce différente de pommes, poires, abricots, mirabelles, cerises, prunes, etc. L’avenir s’annonce fruité.
Nous avons un potager... avec tout plein de choses...
[J’ai reçu ta tendre carte. Une nouvelle douceur.]
Pour la noce de la carte, ce n’est bien évidemment pas une coïncidence... Rien n’est laissé au hasard ma Sandre...
Je n’ai pas compris de quelle sorte de virginité tu m’as fait présent. Pourrais-tu éclairer ma lanterne ?
Je t’aime, et pas pour de rire ! Tendresses et baisers.
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Dimanche 19 mai
Le week-end dernier avec ma Sandre (du jeudi soir au lundi matin) s’est divinement déroulé. Un temps de chiottes à Lyon, mais une illumination que de vivre avec elle.
Les jours passant, j’aime davantage cette jeune femme. Elle est au fond tout ce que j’attendais pour une symbiose sentimentale : douceur et pétillement, intelligence et sensualité... Je nous crois bien engagé pour construire ensemble notre avenir.
Oublié d’indiquer la gentillesse de Madeleine Chapsal qui nous invite, Sandre et moi, à venir cet été dans sa maison de l’île de Ré. Nous devrions y filer une semaine après le mariage de Nadette M. les 13 et 14 juillet.
Heïm m’a confié la mise en place et les contacts à prendre pour une œuvre énorme, en sept volumes, de la fin du XIXe, sur le Cher : le fameux Buhot de Kersers. Nous devrions, par ailleurs, lancer un magasine mensuel en septembre prochain intitulé Histoire insolite, tiré entre 10 000 et 30 000 exemplaires et distribué par les NMPP. Je serai chargé des questions juridiques, des contacts avec le diffuseur, les institutionnels pour la publicité et la rédaction d’articles.
Ma correspondance avec ma Sandre d’amour ne se tarit pas. Témoignage fabuleux de l’intensité de notre relation, malgré la séparation géographique.
Elle vient en fin de semaine prochaine pour le week-end de Pentecôte. A Lutèce tous les deux, pour le meilleur et pour le sublime.
Rien de passionnant dans les médias et leur sélection pour l’actualité. A signaler la sclérose à tendance monomaniaque de Canal +, notamment dans ses émissions en clair du midi et du soir. Ça devient de plus en plus une chaîne au service du Pote système : anathèmes prémâchés envers les uns, complaisance systématique envers les autres, copinage intrinsèque.
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Train Laon-Paris, le 20/05/96.
Ma Sandre que j’aime,
Ne lésinons pas, le temps passant mon attachement à toi va croissant. Ma semaine va se tendre vers ce vendredi 23h05 à la gare de Lyon de Paris.
La complicité que nous avons à partager est sans borne. J’espère que tu ne me tiendras pas rigueur de la petitesse du nid-à-dodo et de son aspect qui n’est pas aussi impeccable que ton adorable appartement.
Rôle inversé, c’est moi qui te reçois et je tenterais, si le temps le permet, de te dévoiler les charmes de la capitale. A quand remonte ta dernière venue à Paris, et vers quoi vont tes préférences pour ce week-end ?
A tout de suite ma douce.
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Le 21 mai 1996.
Ma Sandre attendue,
Juste avant de choper mon Tchou-Tchou je te griffonne quelques mots.
Touchantes, de plus en plus, tes lettres, je les découvre avec une gourmandise accrue.
La tradition ne se perdant pas, je calque mes déambulations épistolaires sur tes inextinguibles interrogations.
[J’étais mal hier soir, j’ai pris un somnifère pour m’endormir, as-tu dormi toi ?]
Après notre conversation sur tes tracas médicaux, je n’ai pas été très serein, je dois l’avouer, mais mon sommeil ne s’est pas perturbé, car notre combat nous unira d’autant plus.
[As-tu fini de lire ton gros pavé ?]
Je n’ai pas achevé Renoir, l’ayant laissé dans mon nid parisien. Hélène T. ma logeuse, qui s’intéresse à la peinture, l’a adoré. Je le déguste par petites touches colorées, ce bel ouvrage.
[As-tu bien avancé ton mémoire ?]
J’ai débuté la rédaction de la deuxième partie, et j’espère avoir achevé ce brouillon rédactionnel à la fin juin. Je suis pris également par le lancement d’un mensuel Histoire insolite, dont je te reparlerai.
[As-tu déniché des trésors enfouis à extraire du passé de Lugdunum ?]
Rien encore cherché sur ton Lugdunum...
[As-tu lu mon livre-souvenir ?]
A quoi fais-tu allusion ? Serais-je déjà en liquéfaction neuronale ?
[Tu as des idées pour la fête des mères ?]
Non point. Pour ma maman, le meilleur des cadeaux serait qu’elle retrouve un travail...
[Tu as « massacré » les tampons attenants aux timbres, ça n’a plus de valeur (sourire). Ce n’est pas grave, c’est gentil de me les avoir envoyé.]
Désolé pour les timbres, je suis un peu balourd des paluches dans le découpage...
[Merci pour tes deux cartes même si je préfère, tu t’en doutes, celle de Renoir.]
Céline n’est donc pas dans ton cœur ? Que t’a-t-il donc fait ?
[Tu m’imagines en muse posant pour un inspiré du pinceau ?]
Certes tu n’aurais pas été un bon modèle pour Rubens, mais d’autres apprécient les lianes félines.
[Tu engraisses autant tes chats que celui de la photo ? (Rires)]
Nos chats bougent beaucoup et ne s’empâtent pas...
Désolé ma douce, à 17h30 je dois retrouver mon train.
Tendrement tiens.
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Au, le 22 mai 1996.
Sandre ma radieuse,
Je reprends mon questionnaire d’hier laissé en suspens.
[Pourquoi as-tu les clefs ? Parce que c’est toi, c’est bête, mais c’est juste. Tu n’es pas brusque, mais fougueux, grande différence. Tu as su toucher mon esprit, mon âme, avant de caresser mes courbes. Tu ne privilégies pas l’un au dépend de l’autre. C’est ça la clef : la communion est totale, s’inscrivant dans une globalité, et rien n’est « amputé ». Il n’y a pas le côté égoïste, sans écoute, et il y a un prolongement naturel entre la vie privée et celle de la cité. Tu ne me manifestes pas de l’intérêt que dans un lit. C’est un vrai partage, échange, et non pas un truc « fun ». J’admire la façon dont tu veux conduire ta personne vers un but, ta façon de m’écrire. Tu as la capacité de me troubler que beaucoup n’ont pas. Tu es droit. Ta parole donnée a de la valeur à mes yeux, alors que beaucoup en usent pour un oui, ou un non. C’est ce romantisme impétueux, cette fougue amoureuse, ce soin que tu as de moi, qui forment un tout. Tu ne m’obliges en rien. La transparence et la franchise dans nos discussions, nos paroles. La légèreté de tes caresses. Tu ne dissimules pas, tes sentiments sont réels, et ne sont pas un prétexte pour abuser de moi. Tu ne triches pas. Ce sont toutes ces choses qui font que je t’aime grandement. Je ne peux te dire, de façon précise, pourquoi j’ai le sentiment que c’est toi que j’attendais depuis si longtemps... Tu es le « concentré » de mes rêves depuis l’enfance. Je perçois une noblesse d’âme en toi mon Loïc. Ce Graal... Tu incarnes un esprit chevaleresque.]
Ton portrait de moi est infiniment touchant. J’espère démontrer dans les années qui viennent qu’il se justifie. Tu deviens essentielle ma Sandre, tu reposes mon âme et vivifies mes sens.
Se surveiller toujours, être à l’affût de sa propre médiocrité latente, guetter les chouïas d’affadissement pour, d’un coup salvateur, repartir : tels sont nos devoirs. T’aimer, tel est mon plaisir.
[Le format des photos n’est pas courant, mais c’est bien. C’est à ton image. Je te les rends vendredi, d’accord ?]
Les photos sont pour toi ma Sandre. Je demanderai à Madeleine Chapsal de nouveaux tirages des vues panoramiques. Je possède une très grande photo de moi (prise par Kate) où je trône, tel un corsaire, chemise blanche au vent, devant un navire... d’Euro-disney. Halte au mégalo !!!
[Tu ne voudrais pas que nous fassions des photos ?Au lieu d’avoir chacun des photos de l’autre, avoir une photo de nous. Je préfère le noir et blanc pour les portraits : le côté intemporel. Là, c’est moi qui va trop vite ? (Sourire)]
Je serais enchanté de figurer à tes côtés pour l’éternité en noir et blanc... J’ai une amie photographe qui pourrait nous prendre. Sinon, as-tu l’idée d’une autre personne pouvant acquitter cette tâche ?
[Le week-end prochain je pense que la spéléo va être difficile de réalisation, non ? (Rires)]
La spéléo chez moi est une chose tout à fait possible si tu consens à respecter la loi du silence... S’empêcher d'exploser attise encore plus le plaisir des profondeurs. Rien que d’y penser, j’en salive ma Sandre.
Pour cet été, hormis notre escapade à l’île de Ré, je ne sais pas si je pourrais prendre une autre semaine. Ce sera plutôt des week-ends prolongés. En août nous pourrions aller voir ma grand-mère ensemble.
Sur ce, je t’envoie des myriades de doux bisous.
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Le 23 mai 1996.
Virevoltante (attention, pas au sens figuré !) Sandre adorée,
L’auras-tu, ne l’auras-tu pas avant ton départ ? Seul le Bon et les ptt le savent. Je vais donc m’en tenir à l’intemporalité de mes sentiments pour toi.
J’ai reçu ce matin ta lettre datée du 20 mai où se nichent les « extases murmurées ». Tu deviens une divine poétesse dans tes courriers ma Sandre...
Toujours aussi abondante en questions, je suis toujours prêt pour y répondre. En avant, plume !
[As-tu goûté les petits cœurs en pensant à moi ?]
J’ai mangé, oui je l’avoue, quelques petits cœurs en pensant au tien qui bat avec tant d’élégance... Je fais du Cabrel là, ‘scuse !
[Vendredi prochain, je pense mettre un tailleur noir avec mes escarpins. Je ne pousserai pas le vice jusqu'à mettre un P.J. D’ailleurs, aimes-tu cela ?]
Ta tenue d’arrivée m’a l’air très appétissante ma foi... Je te promets d’attendre notre arrivée au nid avant de la goûter.
Les P.J. comme tu dis... bof, pas vraiment dans mes obsessions. Tu portes très bien le collant, avec ton corps d’adolescente...
[Quel(s) genre(s) de sport(s) regardes-tu à la télévision ?]
Pas vraiment très accroc du sport à la télé... Quand cela m’arrive ce sera plutôt du tennis, de la Formule 1, voire parfois de la boxe comme tu l’as lu dans mon Journal (test d’attention !).
[Quel a été le résultat de ta visite chez l’ophtalmo ?]
Résultat pour mes yeux : stable situation, légère modification pour le gauche et lentille en mauvais état pour la droite... Stable donc, mais changement global nécessaire.
[Que dis-tu concernant nos modalités de rencontre ?]
Pour mes proches, je dis la vérité : 1er temps en 1992, puis reprise de contact en 1996. Pour les accointances je n’en parle pas...
[Tu sais que tu es encore plus mignon quand tu as les cheveux ébouriffés ?]
Je ne savais pas que mon charme s’intensifiait avec le bazar de ma chevelure... Mais oui, ma Sandre, je me décoifferai sauvagement pour toi... dans l’intimité, hé hé !
[As-tu réfléchi aux variations « aquariales » ? Je suis sans cesse effleurée par le désir de toi. Le bâillonnement a-t-il encore des secrets pour toi, cher ange ?]
Pour nos variations en alcôve réduite, nous improviserons... Nos talents se conjugueront au poil... Quant au bâillonnement, heu... nous verrons si tu ne sais pas te tenir (hé !).
[Cette glace à la poire est un délice... et du Loïc glacé, c’est comment ?]
Glacé, le Loïc a une irrésistible tendance à devenir de la crème fondue... surtout en brûlant pour toi.
[Pour le mariage, voudrais-tu que j’ai les cheveux libres, ou attachés comme pour le gala ? Genre chignon sophistiqué ?]
Je préfère tes cheveux au vent, ma douce, sauf si la tenue exige une sophistication...
Je file à table... Je t’embrasse et je t’aime mon enchanteresse...
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Le 24 mai 1996, 16h30.
Ma Sandre,
Dans quelques heures nous nous retrouverons réunis, mais quand tu liras cette carte, nos doux et bons moments passés ensemble ne seront plus qu’un souvenir.
Pour être encore proche de toi à ton retour, mes plus tendres pensées.
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Mardi 29 mai
Week-end de la Pentecôte avec ma Sandre d’amour. Un temps de chiottes, mais une totale symbiose entre nous, et un épanouissement sensuel prometteur. A Lutèce, nous avons visité notamment les musées d’Orsay et du Louvre.
Le lancement du Buhot de Kersers sur le Cher se prépare... Il faut mettre les turbos.
Beau temps au château, j’achève la rédaction de la deuxième partie de mon mémoire... Je suis confiant pour ma soutenance...
Reçu aujourd’hui une carte adorable de Sandre et une lettre de mon ancien professeur de français (en quatrième et troisième), M. Jean R., aujourd’hui à la retraite dans une petite commune de la Haute-Marne (Doulaincourt), visiblement touché que je reprenne contact avec lui.
Dans l’émission Etat d’urgence de Cavada, consacré au foot et à l’argent, un portrait du joueur Cantona et une synthèse de sa carrière. Personnage attachant et plein de reliefs. Hommage d’un qui n’a rien à foutre du monde de la baballe.
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Au, le 29 mai 1996.
Cher Monsieur,
Très touché par votre réponse, et ravi que vous vous soyez retiré dans les belles régions de la Haute-Marne et de la Franche-Comté. Cette Haute-Marne a retenu toute mon attention au troisième trimestre 1995 dans le cadre de mes activités éditoriales. Nous avons en effet exhumé le magnifique ouvrage d’Emile Jolibois (copies de la couverture, du quatrième et du passage traitant votre commune) préfacé pour l’occasion par le président de la Société archéologique de Langres. Ce magnifique dictionnaire des communes de près de 550 pages date du milieu du XIXe s., et il était grand temps que nous lui redonnions une nouvelle vie.
C’est vrai, je l’avoue, vous êtes le seul professeur avec qui j’ai eu envie de reprendre contact. Le souvenir de votre enseignement, l’alliance que vous faisiez entre une curiosité tous azimuts et une juste sévérité, et surtout les encouragements que vous m’avez faits pour l’écriture ont forgé ce besoin de vous rendre hommage.
Je joins également à ce courrier l’introduction et le plan détaillé de mon mémoire de lettres modernes que je rendrai en septembre. Aviez-vous conservé les textes que je vous avais remis il y a quelques années (en 1988 je crois) ?
Le sérieux de ce travail universitaire ne m’enlève pas mon goût pour des textes plus pamphlétaires que je vous enverrai une prochaine fois.
Au plaisir de vous lire et de vous revoir. Très amicalement.
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Le 29 mai 1996.
Ma Sandre d’amour,
Reçu ta carte d’émotions qui m’a beaucoup touché. Je suis, moi aussi, un peu morose de cet éloignement, mais heureux de notre attachement.
Je ne pensais pas que tu cachais tes larmes lorsque nous avons eu le petit stratus... J’en suis désolé... mais comprend ce que j’ai pu ressentir, même si j’ai tout interprété très mal.
Le temps est bleu et rayonnant... c’est rageant d’avoir loupé cela.
Je ne te prends pas trop de temps ma douce... Beaucoup de courage à toi... et plein de baisers, de caresses... et tout ce qui suit...
A très vite.
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Au, le 31 mai 1996.
Ma Sandre désirée,
A nouveau bercé par ta petite musique épistolaire, je suis enchanté. Bientôt, quand tu auras fini tes examens, je t’apprendrai l’enfer (délicieux) sensuel et coquin que nous pouvons créer par l’écriture. Ceci rapprochera nos chairs et nos âmes. A l’émotion de tes douceurs s’ajoutera la passion charnelle dans toute sa folie. J’en salive déjà, et notre jardin secret s’enrichira de nos exaltations.
Pour être sérieux ma Sandre : ancrage d’une envie et d’un besoin de construire avec toi une forme de bonheur...
A toi mon amour éloigné.
Fougueusement tiens.
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